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3 Sep

Au cours du deuxième trimestre, la croissance canadienne a bondi de 2,9 %

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Publié par: Robert Perrier

Les emplois surpassent les attentes au Canada en mars, mais la croissance des salaires stagne
Statistique Canada vient tout juste de publier les données sur le PIB du deuxième trimestre, indiquant une forte reprise de la croissance pour atteindre son rythme le plus vigoureux en un an. La croissance du produit intérieur brut réel s’est accélérée pour atteindre 2,9 % (tous les chiffres auxquels nous faisons référence sont exprimés en taux annualisés), considérablement à la hausse comparativement au taux de 1,4 % enregistré au premier trimestre. Le résultat obtenu au deuxième trimestre est légèrement au-dessus de la prévision de la Banque du Canada de 2,8 % publiée dans le Rapport sur la politique monétaire d’avril, atténuant la probabilité que la Banque hausse ses taux lors de la prochaine réunion de politiques qui aura lieu mercredi prochain.

Au premier trimestre, la croissance a été ralentie par une forte baisse dans le secteur de l’habitation* (voir la note ci-dessous), lequel a chuté d’un taux annuel de 10,5 % annualisé. Le taux annuel d’investissement dans l’habitation a augmenté d’un modeste 1,1 % au cours du deuxième trimestre. La diminution des coûts de transfert de propriété s’est poursuivie, mais à un rythme plus modeste que lors du premier trimestre, alors que les nouvelles constructions résidentielles se sont repliées pour la première fois depuis le troisième trimestre de 2016. Ces baisses ont toutefois été plus que contrebalancées par une augmentation prononcée des dépenses en rénovations.

Le renforcement de la croissance au deuxième trimestre reflète surtout une forte hausse des exportations (+12,3 %) – la hausse trimestrielle la plus importante depuis 2014 – qui est en partie attribuable aux augmentations des exportations de produits énergétiques et de biens de consommation, plus particulièrement des produits pharmaceutiques. Les exportations d’aéronefs, de moteurs et de pièces d’aéronefs ont fortement augmenté en raison de la hausse des livraisons de jets d’affaires à destination des États-Unis et d’autres pays. Les exportations de services ont enregistré une légère baisse. Les exportations nettes (c.-à-d. les exportations moins les importations de biens et de services) ont augmenté à un taux annuel de 6,5 % au cours du deuxième trimestre comparativement à 4,2 % au trimestre précédent.

La hausse des dépenses de consommation a également stimulé la croissance. Les dépenses de consommation finale des ménages (+2,6 %) ont augmenté de plus du double du rythme enregistré au premier trimestre, renversant ainsi la tendance à la baisse des trois trimestres précédents. La croissance est largement attribuable aux dépenses en services (+3,2 %), qui ont augmenté plus rapidement que les dépenses en biens. Les dépenses liées au logement (logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles), en hausse d’un taux annuel de 2,4 %, sont celles qui ont contribué le plus à la croissance généralisée dans la consommation des services.

Les dépenses des ménages pour des biens ont augmenté au taux annuel de 2 % après avoir été stables au premier trimestre, avec des rebonds dans les biens semi-durables et non durables. Les achats de véhicules ont ralenti d’un taux annuel de 2 %. Un élément négatif relativement aux données sur la consommation peut être l’augmentation des dépenses qui a été financée par un taux d’épargne des ménages plus faible. Le taux d’épargne des particuliers a chuté à 3,4 % au deuxième trimestre, comparativement à 3,9 % au trimestre précédent et au taux de 4,5 % observé au cours du dernier trimestre de 2017.

Malgré la nette amélioration de la croissance au deuxième trimestre, les observateurs semblent déçus, car le ralentissement des investissements des entreprises a fait en sorte que la croissance se situe sous la prévision de 3,5 % de certains économistes de Bay Street. La valeur du dollar canadien immédiatement chuté en réaction au rapport.

Les investissements des entreprises dans les ouvrages non résidentiels, les machines et le matériel industriels et les ordinateurs et l’équipement périphérique d’ordinateurs ont ralenti pour atteindre à leur rythme le plus lent observé depuis le quatrième trimestre de 2016, pouvant fort bien refléter l’incertitude entourant la renégociation de l’ALENA et l’imposition de tarifs sur le nombre croissant des exportations canadiennes aux États-Unis. La confiance des entreprises et les investissements en formation de capital étant un indicateur majeur de la croissance future, le ralentissement du deuxième trimestre augure mal pour les perspectives. La plupart des analystes prévoient un ralentissement marqué dans la croissance du PIB pour le présent trimestre d’au moins 2 %.

Perspectives relativement aux taux d’intérêt
À la lumière de la décélération des investissements des entreprises, la Banque du Canada a peu de raisons pour augmenter les taux d’intérêt lors de la prochaine réunion de politiques de la Banque qui aura lieu le 5 septembre. Les investisseurs parient qu’une hausse du taux en octobre est une quasi-certitude, selon Bloomberg Canada.

La semaine dernière, le gouverneur de la Banque du Canada Stephen Poloz a minimisé les inquiétudes par rapport à l’inflation et la possibilité d’augmentations du taux d’intérêt agressives lors d’une conférence de la Banque fédérale américaine aux États-Unis. M. Poloz a affirmé que la récente flambée de l’inflation qui a atteint 3 % en juillet, le taux le plus élevé parmi le G-7, était attribuable à des facteurs transitoires qui seraient renversés un jour ou l’autre. La mesure des salaires dans le rapport d’aujourd’hui sur le PIB, ainsi que les chiffres sur les gains d’emplois, valide la mesure commune des salaires (« salaires-comm ») de la Banque du Canada qui augmentent à 2,4 % au cours du deuxième trimestre, ayant peu changé depuis l’augmentation enregistrée au premier trimestre.

Bien que le Canada se heurte à des contraintes de capacité et à une pénurie de main-d’œuvre qui s’accentue, le gouverneur Poloz ne semble pas pressé de ramener les taux d’intérêt à des niveaux non stimulants. À de nombreuses reprises, il a plaidé en faveur d’une politique gradualiste, mentionnant une incertitude accrue plutôt que la géopolitique et le commerce ainsi que l’incapacité des économistes à mesurer les paramètres critiques comme la croissance potentielle.

La Banque du Canada a augmenté son taux d’intérêt de référence à quatre reprises depuis juillet 2017 dans le but de refroidir l’économie et les indicateurs du marché laissent croire que les investisseurs s’attendent à ce qu’il y ait trois hausses au cours de la prochaine année, après quoi la banque centrale prévoit une longue pause. Cela fera en sorte que le taux de référence cible, qui se situe actuellement à 1,5 %, sera à 2,25 %, soit sous le taux « neutre » de 3 % que la Banque estime comme étant un niveau final et non stimulant quant aux coûts d’emprunt à un jour.

Dre Sherry Cooper
Économiste en chef, Centres hypothécaires Dominion
drcooper@dominionlending.ca