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20 Mar

Budget fédéral de 2019 – Mesures pour les acheteurs de maison

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Publié par: Robert Perrier

Dans son quatrième plan financier, le gouvernement Trudeau a dépensé la totalité de ses recettes inattendues, ce qui n’a guère modifié la projection du déficit. Dans ce budget électoral, le ministre des Finances Bill Morneau a annoncé une nouvelle initiative de dépenses de 22,8 milliards de dollars sur six ans, axée principalement sur les acheteurs de maison, les étudiants et les aînés. Dans son premier budget, M. Trudeau avait promis d’éliminer toute trace d’encre rouge d’ici cette année. Il se dirigera plutôt vers les élections d’octobre avec un déficit annuel de près de 20 milliards de dollars. Ottawa prévoit une série de déficits à deux chiffres d’ici la fin de 2022.

Le ratio clé de la dette au PIB devrait s’établir à 30,8 % au cours du présent exercice et ne baisser que très lentement pour atteindre 30 % au cours de la période de prévision de quatre ans.

Le budget d’aujourd’hui a offert de l’aide aux jeunes acheteurs de maison, dont bon nombre ont beaucoup de difficulté à se permettre d’acheter dans certaines de nos villes les plus chères. Deux mesures visaient les acheteurs d’une première habitation :

Augmentation du retrait maximal des REER

La mesure la plus simple à comprendre est l’augmentation de 10 000 $ du retrait maximal non imposable dans le cadre du Régime d’accession à la propriété (RAP) fédéral, qui passe à 35 000 $ à compter de maintenant. Ce retrait admissible pour les acheteurs d’une première habitation s’appliquera également aux personnes qui vivent la rupture d’un mariage ou d’une union de fait et qui ne satisfont pas à l’exigence habituelle d’être un acheteur d’une première maison.

La nouvelle limite s’appliquerait aux retraits RAP effectués après le 19 mars 2019.

Ceux qui profitent de la limite supérieure du RAP devront garder à l’esprit que le délai de remboursement est inchangé. Les acheteurs de maison doivent remettre l’argent dans leur REER sur une période de 15 ans afin d’éviter l’impôt sur le revenu ordinaire sur les retraits RAP. Les Canadiens qui utilisent ces fonds devront maintenant rembourser un maximum de 35 000 $, au lieu de 25 000 $, au cours de la même période.

Le geste le plus audacieux : l’Incitatif à l’achat d’une première propriété de la SCHL :

Un fonds de 1,25 milliard de dollars administré par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) sur trois ans offrira 5 % du coût d’une maison existante et 10 % du prix d’une maison neuve, ce qui équivaut à un prêt sans intérêt à rembourser lorsque la propriété sera vendue. L’argent irait aux acheteurs d’une première habitation qui demandent un prêt hypothécaire assuré. Les principales conditions sont les suivantes :

  • les utilisateurs doivent avoir une mise de fonds minimale de 5 %, mais inférieure à 20 %;
  • le revenu du ménage doit être inférieur à 120 000 $;
  • le prix d’achat ne peut être supérieur à quatre fois le revenu du ménage de l’acheteur.

Par exemple, supposons que vous désirez acheter une maison de 400 000 $ avec la mise de fonds minimale requise de 5 %, ce qui équivaut à 20 000 $. Avec le nouvel incitatif, vous pourriez recevoir jusqu’à 40 000 $ (pour une nouvelle habitation) par l’entremise de la SCHL. Maintenant, au lieu de contracter un prêt hypothécaire de 380 000 $, vous n’auriez plus qu’à emprunter 340 000 $. Cela réduirait votre facture hypothécaire mensuelle de plus de 1 970 $ à moins de 1 750 $. L’Incitatif est de 10 % pour les acheteurs qui acquièrent une maison neuve et de 5 % pour les maisons existantes.

Les propriétaires devraient rembourser ce prêt hypothécaire dit « partagé » plus tard, probablement au moment de la revente, bien qu’on ne sache pas très bien comment cela fonctionnerait. La SCHL pourrait participer à tout gain (ou perte) en capital, en recevant 5 % ou 10 % du prix de vente (et non du prix d’achat). Au moment de la rédaction du présent article, ces détails n’avaient pas encore été réglés.

Ces stipulations limitent effectivement les achats dans le cadre de ce plan à des propriétés dont le prix est inférieur à 500 000 $ (maximum de 480 000 $ en prêt hypothécaire assuré et l’Incitatif, plus la mise de fonds), ce qui se rapproche du prix de vente moyen national de 468 350 $ (qui est inférieur de 5,2 % au prix moyen de l’an dernier). Toutefois, le prix moyen national est fortement faussé par les ventes dans le Grand Vancouver et la région du Grand Toronto, deux des marchés les plus actifs et les plus chers du Canada. Si l’on exclut ces deux marchés du calcul, on réduit de près de 100 000 $ le prix moyen national, le ramenant à un peu moins de 371 000 $. Ce que cela nous indique, c’est que l’aide aux acheteurs d’une première habitation est plutôt maigre pour les jeunes qui vivent dans nos deux régions les plus coûteuses.

On peut soutenir que le prix maximum de 500 000 $ pour ce plan est le point où le défi de l’abordabilité ne commence vraiment que dans nos marchés de l’habitation à prix plus élevés. Les problèmes d’abordabilité les plus aigus concernent les logements en copropriété de taille moyenne ou grande ou les maisons individuelles dans la région du Grand Toronto et dans le Grand Vancouver; pourtant, la plupart d’entre eux se situent au-delà de la fourchette de prix couverte par le plan de la SCHL. L’impact, bien sûr, serait plus important dans d’autres régions, mais l’abordabilité dans bon nombre d’entre elles est historiquement tout à fait normale. L’impact le plus important se fera sentir dans les nouvelles constructions à bas prix.

De plus, les demandeurs de prêts hypothécaires en vertu de ce régime doivent toujours être admissibles à la simulation de crise imposée par le gouvernement fédéral, ce qui garantit que les emprunteurs seront en mesure de faire face aux paiements même si les taux d’intérêt augmentent d’environ deux pour cent. L’Incitatif, toutefois, abaisserait considérablement la barre pour les demandeurs, car ils devraient maintenant démontrer leur admissibilité à un prêt hypothécaire moins élevé.

Avant le budget, de nombreux intervenants soutenaient qu’en raison du ralentissement rapide de l’économie et du fait que la Banque du Canada n’augmentera probablement pas les taux d’intérêt cette année, la simulation de crise de la ligne directrice B-20 est trop coûteuse et devrait être assouplie.

Le gouvernement espère que le plan sera opérationnel d’ici septembre.

Conclusion : Ces mesures en matière de logement sont axées sur la demande du marché, plutôt que d’encourager la construction de nouveaux logements abordables. Bien que le budget prévoie 10 milliards de dollars sur neuf ans pour des nouveaux logements locatifs, il ne propose pas d’allégements fiscaux ni de réduction des formalités administratives pour les constructeurs d’habitations.

Dre Sherry Cooper
Économiste en chef, Centres hypothécaires Dominion
drcooper@dominionlending.ca