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6 Août

La baisse d’un quart de point du taux de la Fed ne signale pas une grande tendance

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Publié par: Robert Perrier

Le Federal Open Market Committee (FOMC) a réduit son taux cible à un jour de 25 points aujourd’hui, comme prévu. Le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Power, a toutefois précisé qu’il s’agissait de « s’assurer contre des risques baissiers » plutôt que le début d’une série de réduction de taux. Sur Twitter, le président Trump a réclamé de « fortes » réductions de taux et presse depuis des mois la Réserve fédérale d’assouplir la politique monétaire. Il est inusité de voir la Réserve réduire les taux d’intérêts alors que l’économie américaine connaît une vigueur soutenue et que le chômage a connu d’énormes baisses.

Je ne peux pas me rappeler une volte-face de la politique si peu motivée. De fait, la déclaration du FOMC commence comme suit : « L’information reçue depuis que le Federal Open Market Committee s’est réuni en juin indique que le marché du travail reste solide et que l’activité économique a augmenté à un taux modéré. La hausse de l’emploi a été solide, en moyenne, ces derniers mois, et le taux de chômage est resté faible. »

La pression exercée par la Maison-Blanche est inédite. C’est au point où le président Trump a publiquement menacé, si la Réserve ne réduit pas les taux, de rétrograder son président Jerome Powell. Il propose aussi de pourvoir les sièges vacants en nommant des personnes favorables à des taux bas. Cet empiétement sur l’indépendance de la Réserve est très dangereux pour la crédibilité de la banque centrale. Il affaiblira certainement le dollar américain s’il était suivi par des réductions de taux supplémentaires.

Les dépenses de consommation restent élevées. Cependant, un ralentissement des investissements fixes des entreprises a été causé par l’insistance du président américain pour créer des tensions commerciales avec la Chine, le Canada, le Royaume-Uni et d’autres partenaires commerciaux. L’économie mondiale a ralenti du fait de l’incertitude. L’économie chinoise a sensiblement décéléré, et les exportations manufacturières et agricoles vers la Chine en ont particulièrement souffert.

Une autre question inquiétant le FOMC est le faible niveau de l’inflation. La Réserve fédérale vise un taux d’inflation de 2 %. La mesure de l’inflation privilégiée par la Réserve se situe actuellement vers 1,4 % à 1,6 %.

Deux gouverneurs de la Banque fédérale de réserve ont voté contre cette mesure, préférant lors de cette réunion de s’en tenir à la plage cible précédente. C’est la première fois depuis que Jerome Powell a assumé la présidence en 2018 que deux décideurs marquaient une dissidence.

La mesure d’aujourd’hui est la première réduction du taux d’intérêt depuis le début de la crise financière il y a plus de 10 ans. La Réserve a commencé à normaliser les taux d’intérêt en 2015, après qu’ils eurent sombré à des niveaux historiquement bas. L’économie américaine se redressait, et les taux des fonds fédéraux ont continué d’augmenter jusqu’en décembre 2018. La normalisation de la politique monétaire prévoyait aussi la réduction graduelle du bilan de la Réserve – en vendant des obligations sur le marché, réduisant lentement la liquidité. Aujourd’hui, la Réserve a affirmé qu’elle cesserait de le faire dès demain, plutôt qu’à l’échéance prévue de septembre.

En somme : La Banque du Canada ne suivra pas la Réserve fédérale américaine. Les taux d’intérêts canadiens sont déjà inférieurs aux taux américains. La plage cible des fonds fédéraux américains est maintenant de 2 % à 2,25 %, alors qu’au Canada, le taux cible à un jour est de 1,75 %. Par ailleurs, le rapport d’aujourd’hui sur le PIB réel a étonné par sa vigueur, donnant à croire que la croissance du PIB au deuxième trimestre pourrait être près de 3 %. Voilà qui est largement au-delà de l’estimation précédente de la Banque, ce qui justifie qu’elle reste discrète.

Dre Sherry Cooper
Économiste en chef, Centres hypothécaires Dominion
drcooper@dominionlending.ca