Retour au blog
11 Jan

La Banque du Canada décide d’attendre, révisant à la baisse les perspectives du marché du pétrole

Non classifié(e)

Publié par: Robert Perrier

Les emplois surpassent les attentes au Canada en mars, mais la croissance des salaires stagne
La Banque du Canada a laissé le taux directeur de financement à un jour à 1,75 %, comme prévu. Dans une autre déclaration conciliante, la Banque du Canada a reconnu un ralentissement de l’activité économique mondiale et souligné que les prix du pétrole sont environ 25 % plus faibles qu’elle l’avait prévu dans le Rapport sur la politique monétaire (RPM) d’octobre. Ces prix plus bas reflètent surtout les augmentations soutenues de l’offre de pétrole américain et des inquiétudes accrues concernant la demande mondiale, particulièrement à la lumière d’une guerre commerciale possible entre les États-Unis et la Chine (voir le graphique sur le pétrole ci-dessous).

La banque a également fait remarquer que ces inquiétudes se sont traduites dans les marchés obligataires et boursiers. Les écarts de crédit avec les obligations du Trésor se sont creusés et les marchés boursiers étaient en liquidation partout dans le monde (voir le graphique ci-dessous). Les cours des actions et des rendements obligataires ont reculé en raison de l’inquiétude des marchés quant à la croissance mondiale. La volatilité s’est accrue et les écarts de taux sur les obligations des sociétés se sont considérablement élargis. Un resserrement des conditions d’emprunt a été particulièrement marqué dans le secteur énergétique nord-américain, reflétant le recul des prix du pétrole.

Les faibles prix du pétrole ont eu une incidence négative sur les perspectives économiques canadiennes et « les contraintes de transport et l’augmentation de la production se sont combinées pour pousser à la hausse les stocks de pétrole dans l’Ouest et exercer encore plus de pressions à la baisse sur les prix de référence canadiens. Bien que les écarts de prix se soient resserrés ces dernières semaines après l’annonce des réductions obligatoires de la production en Alberta, les investissements dans le secteur pétrolier canadien devraient s’affaiblir davantage. »

La banque a reconnu que l’économie tourne près de son potentiel, le taux de chômage est à son plus bas en 40 ans et le commerce s’améliorera probablement en raison du faible dollar, de l’accord commercial avec le Mexique et les États-Unis (qu’on appelle maintenant l’ACEUM) et des mesures fiscales fédérales qui visent les investissements. Néanmoins, les dépenses de consommation et l’investissement dans le logement « ont été plus faibles que prévu, les marchés de l’habitation s’ajustant aux mesures municipales et provinciales, aux changements des règles hypothécaires et aux taux d’intérêt plus élevés. Les dépenses des ménages seront freinées davantage par la lenteur de la croissance dans les provinces productrices de pétrole. »

La contribution à la croissance économique réelle annuelle moyenne provenant de l’investissement dans le logement a été révisée à la baisse à -0,1 % cette année, comparativement à la prévision d’octobre qui s’établissait à +0,1 %.

La Banque du Canada a révisé à la baisse ses prévisions quant à la croissance du PIB réel en 2019 à 1,7 %, soit 0,4 point de pourcentage de moins qu’elle avait prévu en octobre. Selon la banque, « ce ralentissement engendrera une modeste marge de capacités excédentaires, principalement dans les régions productrices de pétrole. Néanmoins, les indicateurs de la demande devraient commencer à afficher une vigueur renouvelée dans les premiers mois de 2019, et la croissance devrait dépasser son potentiel et atteindre 2,1 % en 2020. »

L’inflation demeure près de 2 %, la cible de la banque centrale, après avoir chuté à 1,7 % en novembre en raison des prix plus bas de l’essence. Alors que les faibles prix de l’essence pèseront sur l’inflation cette année, la faiblesse de la valeur du dollar canadien aura une incidence compensatoire sur l’IPC. Dans l’ensemble, la banque est d’avis que l’inflation retournera à environ 2 % d’ici la fin de l’année.

Considérant l’ensemble de ces facteurs, le Conseil de direction estime encore que le taux d’intérêt directeur devra augmenter jusqu’à l’intérieur d’une fourchette neutre pour assurer l’atteinte de la cible d’inflation. « Le rythme approprié des hausses de taux dépendra de l’évolution des perspectives, et tout particulièrement de celle des marchés pétroliers, du marché canadien du logement et des politiques commerciales mondiales. »

Conclusion : Pour la première fois, la Banque du Canada admet, dans le RPM d’aujourd’hui, que le ralentissement dans le marché du logement a été plus dramatique que les membres du personnel de la banque l’avaient prévu. Le RPM de janvier stipule que « les politiques provinciales et municipales en matière de logement, le resserrement des règles du financement hypothécaire ainsi que les taux hypothécaires plus élevés continuent de peser sur l’activité dans le secteur du logement. Le ralentissement de l’activité dans certains marchés a été associé à une baisse de l’activité spéculative. Il est donc difficile d’évaluer la sensibilité de la demande non spéculative par rapport aux divers changements de politique. Les indicateurs mensuels laissent supposer que les dépenses consacrées au logement se sont probablement contractées de nouveau au quatrième trimestre. L’activité plus faible que prévu dans le secteur du logement ces derniers mois et les analyses du personnel donnent à penser que l’effet combiné du resserrement des règles hypothécaires et des taux d’intérêt plus élevés a été plus important qu’on l’avait précédemment estimé. La Banque continuera à suivre l’évolution des marchés du logement afin d’évaluer la façon dont le secteur de la construction s’adapte au déplacement de la demande vers les logements de moindre valeur. »

Selon la banque, il y a moins d’urgence à hausser les taux d’intérêt puisque l’économie compose avec l’effondrement des prix du pétrole et de faibles marchés du logement. Les cinq hausses de taux d’intérêt qui ont eu lieu depuis le milieu de 2017 ont une incidence plus importante sur les dépenses que ce que la banque avait prévu. Une pause à court terme des hausses de taux est maintenant probable. L’économie a considérablement ralenti au cours du quatrième trimestre de l’année dernière, ralentissement qui se poursuivra dans le premier trimestre de cette année en raison de la chute des prix du pétrole et des réductions dans la production du pétrole mises en œuvre par le gouvernement de l’Alberta.

Bien qu’il soit peu probable que la banque ait mis fin au resserrement au cours de ce cycle, nous pouvons nous attendre à ce que les taux demeurent stables jusqu’à ce qu’elle ait la preuve solide d’une reprise dans le secteur pétrolier et celui du logement, alors que la sensibilité des Canadiens par rapport aux taux d’intérêt atteint un sommet historique.

Dre Sherry Cooper
Économiste en chef, Centres hypothécaires Dominion
drcooper@dominionlending.ca