Comme prévu, la Banque du Canada a maintenu son taux aujourd’hui, soulignant que « la situation concernant les politiques commerciales » est une « source d’incertitude importante et croissante pour les perspectives des économies mondiale et canadienne ».
Lorsque la septième ronde de négociations de l’ALENA a débuté à Mexico, le président Trump a largué une bombe, à la fin de la semaine dernière, menaçant d’imposer des droits de 25 % sur les importations d’acier importé et de 10 % sur les importations d’aluminium, et ce, pour des raisons de sécurité nationale. La nouvelle s’est répandue dans le monde et les partenaires commerciaux européens des États-Unis ont annoncé qu’il fallait s’attendre à ce que des mesures de rétorsion soient mises en place rapidement. L’Union européenne a renchéri face à Donald Trump en augmentant les droits sur les produits typiquement américains, en précisant qu’elle imposerait des droits sur des produits comme Harley-Davidson, le bourbon du Kentucky et les jeans Levi’s, si le président va de l’avant avec son plan. Paul Ryan, porte-parole de la Chambre des représentants, est le représentant républicain du Wisconsin où est situé le siège social de Harley-Davidson. Il a immédiatement exhorté le président de se rétracter ou « d’être plus chirurgical » en ce qui concerne les tarifs. Les partisans purs et durs, comme le secrétaire du Commerce Wilbur Ross, ont affirmé que toutes représailles seraient négligeables.
Les conseillers économiques républicains notoires du président ont affirmé que le plan tarifaire ferait plus de mal que de bien, et qu’il aurait des effets défavorables sur les consommateurs et sur de nombreuses entreprises qui utilisent du métal importé dans la fabrication de leurs produits. Par exemple, le nombre d’emplois perdus dans les secteurs de l’automobile et de la construction pourrait être beaucoup plus important que le serait l’incidence positive sur les quelques emplois du l’industrie de l’acier, surtout en Pennsylvanie. Les prix de nombreux produits augmenteraient, y compris les coûts des infrastructures, de l’énergie et des produits alimentaires.
Le Canada est au point zéro dans ce tourbillon, car il s’agit du principal exportateur d’acier et d’aluminium aux États-Unis, ayant fourni de l’aluminium pour une valeur de 7,2 milliards de dollars et 4,3 milliards de dollars d’acier aux Américains, l’année dernière. M. Trump a souvent accusé la Chine d’obliger les entreprises d’acier et d’aluminium américaines à se plier en inondant le marché de matériaux moins onéreux, mais jusqu’à maintenant, il a refusé d’exclure le Canada de la proposition tarifaire, tenant le Canada en otage afin d’en arriver à un ALENA qui lui soit favorable.
Le Canada et le reste du monde souhaitent que les voix raisonnables prévalent, mais la démission de Gary Cohn, conseiller économique de la Maison-Blanche et ancien président de Goldman Sachs, est une victoire pour les protectionnistes (et les rapaces de l’immigration). Étant un démocrate reconnu, M. Cohn était perçu comme l’un des politiciens modérés dans l’entourage immédiat du président. Son absence amplifiera des voix comme celle du secrétaire du Commerce Wilbur Ross et du conseiller en matière de commerce Peter Navarro qui appuient les impulsions du président à s’apposer au Congrès et à provoquer des guerres commerciales à l’échelle mondiale.
Le logement est un autre facteur qui reporte les hausses de taux
Même avant que les tensions commerciales ne dégénèrent, la Banque du Canada s’inquiétait de l’incidence de la hausse des taux d’intérêt hypothécaires et des nouvelles directives hypothécaires sur le logement, un élément important qui a contribué à la croissance de 3 % de l’économie l’année dernière. « Les données vigoureuses en matière de logement enregistrées à la fin de 2017, et les données plus faibles observées au début de cette année, indiquent un certain devancement de la demande avant l’entrée en vigueur », selon le communiqué de presse de la Banque du Canada. La banque centrale surveille la sensibilité économique à des taux d’intérêt plus élevés, mentionnant que « la croissance du crédit aux ménages a décéléré pendant trois mois d’affilée. »
L’inflation a démontré une tendance à la hausse pour s’approcher de la cible de 2 %. La croissance des salaires s’est raffermie, mais même avec la hausse du salaire minimum, l’augmentation de la rémunération demeure plus petite que d’habitude dans un contexte de plein-emploi.
Encore une fois, la Banque du Canada a mentionné qu’elle s’attend à ce que les perspectives économiques justifient des taux d’intérêt plus élevés avec le temps, mais il sera probablement nécessaire de maintenir un certain degré de détente monétaire afin que l’économie continue de tourner près de son potentiel et que l’inflation demeure à la cible. La prochaine annonce prévue de la Banque du Canada concernant sa politique aura lieu le 18 avril, alors que sa perspective économique complète sera mise à jour dans le Rapport sur la politique monétaire trimestriel.
Si l’administration Trump va de l’avant avec ses droits, la Banque maintiendra ses taux également en avril. Les investisseurs ont réduit leurs paris sur les hausses de taux après une croissance plus faible que prévu au quatrième trimestre, une tourmente dans les marchés d’actions mondiaux et un déclin considérable de la valeur du dollar canadien. Les négociateurs ne prévoient pas une autre hausse avant juillet, selon les calculs des swaps indexés sur le taux à un jour de Bloomberg News. Il y a un mois, les prévisions indiquaient au moins une augmentation avant le mois de mai. Selon l’évaluation de la Banque du Canada, les taux d’intérêt demeurent à deux points de pourcentage sous ce qu’elle considérerait comme étant « neutre » pour l’économie. |