Face à un déclin dévastateur de l’économie canadienne, la Banque du Canada estime aujourd’hui que le pire des répercussions négatives de la pandémie sur l’économie mondiale est passé. Elle concède toutefois que l’incertitude reste élevée. La Banque a maintenu son taux cible à un jour à 0,25 %. Aucune réduction supplémentaire n’était attendue, puisque la Banque a déjà affirmé que le niveau de 0,25 % est la valeur plancher du taux directeur. Le gouverneur Poloz a pratiquement exclu des taux d’intérêt négatifs à moins que l’économie ne se détériore encore radicalement.
La réunion d’aujourd’hui du Conseil de direction est la dernière de Stephen Poloz en tant que gouverneur. Son successeur Tiff Macklem prend la relève ce même jour. M. Macklem a participé comme observateur aux délibérations du Conseil de direction. Il a adhéré à la décision prise sur le taux et aux mesures annoncées dans le communiqué de presse, assurant ainsi la continuité dans la politique monétaire.
La Banque a pris des mesures très énergiques pour soutenir la liquidité et le bon fonctionnement des marchés financiers, en achetant des titres à court terme et à long terme. Au bilan de la banque centrale, les titres ont augmenté jusqu’à un niveau correspondant à environ 20 % du PIB du Canada, contre 5 % avant la crise. Ce niveau reste bien inférieur à ceux de la Réserve fédérale américaine, de la Banque du Japon et de la Banque centrale européenne, qui ont toutes procédé à des opérations d’assouplissement quantitatif depuis la crise financière d’il y a plus de 10 ans. Cependant, les achats de titres effectués par la Banque du Canada ont été exceptionnels au regard de la taille de notre économie.
« Les mesures budgétaires fermes et ciblées, conjuguées aux taux d’intérêt plus bas, amortissent l’impact des fermetures sur le revenu disponible et aident à jeter les bases de la reprise économique », selon la banque centrale. Celle-ci soutient que l’économie canadienne semble avoir évité le scénario le plus grave évoqué dans son Rapport sur la politique monétaire (RPM) d’avril.
Au premier trimestre (T1), le niveau du PIB réel était à 2,1 % sous le niveau du T4 de 2019. La Banque du Canada prévoit maintenant que le PIB réel du T2 baissera encore de 10 à 20 %, conséquence des diverses activités qui restent à l’arrêt et de la forte réduction des investissements dans le secteur de l’énergie. Il y aurait ainsi un recul, du pic au creux, de 12 à 22 %, au lieu des 15 à 30 % qu’avait précédemment entrevus la banque centrale. Selon la Banque du Canada, « l’économie canadienne semble avoir évité le scénario le plus pessimiste ».
En somme : Bien que le degré d’incertitude reste élevé, il semble que le pire du ralentissement économique soit passé. Les données préliminaires de mai indiquent que les ventes de maisons ont progressé d’un mois à l’autre en mai dans les régions du Grand Toronto et du Grand Vancouver, même si elles restent sensiblement sous les niveaux d’un an plus tôt.
Certains s’inquiètent de l’inflation que pourrait déclencher les mesures monétaires et fiscales exceptionnelles prises pour stimuler l’économie ces derniers mois. Le gouverneur Poloz a indiqué clairement que sans ces mesures, les résultats désastreux de l’arrêt de l’économie auraient au contraire entraîné une forte déflation. Une déflation, combinée à des niveaux d’endettement élevés, aurait provoqué une dépression. Les modèles économiques sont d’une utilité limitée face aux retombées de la pandémie. Les responsables des politiques doivent faire preuve de souplesse dans leur action. Lorsque l’économie aura été relancée suffisamment et qu’ils commenceront à retirer les mesures spéciales, il leur faudra tout autant de doigté aussi bien sur le plan fiscal que sur le plan monétaire.