Comme prévu par tous, le Conseil de direction de la Banque du Canada a maintenu son taux de financement à un jour à 1,75 % tout en faisant état de perspectives économiques plus faibles pour le Canada. Le ton conciliant de la déclaration faite aujourd’hui par la Banque du Canada est directement à l’opposé de l’attitude qu’elle avait adoptée lors de sa dernière rencontre, le 24 octobre dernier. Depuis ce temps, l’économie mondiale a ralenti et les prix du pétrole ont fortement baissé. Des perspectives inquiétantes à l’endroit du secteur énergétique de l’Alberta ont pesé sur l’économie, alors que les États-Unis ont augmenté leur production de pétrole de schiste. « Les prix de référence pour le pétrole canadien de l’Ouest – à la fois le lourd et, plus récemment, le léger – ont été tirés encore plus vers le bas par les contraintes de transport et une accumulation des stocks. » En Alberta, le gouvernement Notley a imposé une réduction de la production, ce qui amène la banque à conclure que le secteur énergétique du Canada sera « sensiblement plus faible » que prévu.
L’économie canadienne a crû à un taux annuel de 2 % au cours du troisième trimestre, ce qui cadre avec les prévisions de la Banque, mais les données de septembre indiquent une baisse considérable du dynamisme pour le quatrième trimestre. La plus grande déception a été la chute des investissements des entreprises, ce qui reflétait probablement l’incertitude commerciale (voir le graphique ci-dessous). L’investissement des entreprises dans les secteurs autres que celui de l’énergie augmentera probablement avec la signature de la nouvelle entente commerciale, l’AEUMC, les nouvelles mesures fiscales fédérales qui amélioreront les déductions pour la dépréciation des immobilisations, et les contraintes de capacité persistantes.
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Le crédit des ménages semble se stabiliser après un ralentissement marqué ces derniers mois. Cependant, la hausse des taux d’intérêt de cette année a eu des répercussions plus importantes sur les dépenses sensibles aux variations des taux d’intérêt que ce à quoi l’on s’attendait généralement. Par exemple, la chute des ventes d’automobiles ont mis en évidence que des frais d’emprunt plus élevés freinent davantage l’activité économique que ce que la banque centrale avait prévu. Les ventes de véhicules légers ont chuté de 9,4 % en novembre, la baisse la plus importante depuis 2009. De plus, les données de la Banque du Canada révèlent que la croissance dans les prêts hypothécaires résidentiels a décéléré de 1,4 % en septembre, sur une base de trois mois annualisée, le rythme le plus faible depuis 1982.
La banque a augmenté les coûts d’emprunt à cinq reprises depuis juillet 2017. La construction de nouveaux logements a diminué pour le troisième trimestre consécutif, à la baisse d’un taux de 5,9 % annualisé au cours du troisième trimestre. De plus, selon le Toronto Real Estate Board (TREB), le marché du logement de Toronto a enregistré sa baisse de ventes mensuelles la plus importante depuis mars, alors que les prix demeurent à peu près inchangés. Le TREB a rapporté aujourd’hui que les ventes dans la plus grande ville du Canada ont chuté de 3,4 % en novembre, comparativement au mois précédent (voir le graphique ci-dessous).
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Dans la région de Toronto, le marché du logement s’est stabilisé après un ralentissement des ventes et des prix plus tôt cette année, sur fond de règles sur les prêts hypothécaires encore plus contraignantes. Le marché a repris de la vigueur au cours de l’été, mais les ventes ont affiché une baisse pour le troisième mois consécutif.
La baisse des ventes peut en partie être attribuable à un déclin des nouvelles inscriptions, lesquelles ont diminué de 26 %, d’une année à l’autre. « En novembre, les nouvelles inscriptions ont été plus faibles que les ventes d’une année à l’autre », a indiqué Garry Bhaura, le président du conseil, dans une déclaration. « Cela laisse entendre que, dans plusieurs quartiers, la concurrence entre les acheteurs s’est peut-être accrue. Des conditions de marché relativement serrées au cours des quelques derniers mois ont jeté les bases d’une nouvelle croissance des prix. »
Voici un échantillonnage d’autres facteurs qui soulignent certains des obstacles auxquels l’économie canadienne est confrontée :
Selon le Citibank’s Surprise Index, les données économiques publiées sont sous les attentes, ce qui indique la différence entre les attentes du marché quant aux indicateurs économiques et leurs valeurs réelles. Cet indice est à la baisse depuis l’été dernier et a été sous zéro depuis la mi-octobre, à peu près au moment où la Banque du Canada a publié son dernier Rapport sur la politique monétaire(RPM) et annoncé la hausse de taux la plus récente.
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L’indicateur avancé du Macdonald-Laurier Institute a chuté de 0,1 % en octobre. La première baisse de la mesure de l’indice composé depuis janvier 2016 a surtout été causée par un recul de l’indice composé S&P/TSX qui a chuté de 6,5 % au cours du mois, en plus des diminutions marquées des prix des produits de base.
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De plus, les pressions inflationnistes ont diminué. Par exemple, les prix de l’essence ont chuté d’environ 25 cents canadiennes pour se rapprocher du litre à un dollar depuis octobre. Le dernier énoncé de politique indique que « l’inflation mesurée par l’IPC, qui se chiffrait à 2,4 % en octobre, se trouve juste au-dessus de la cible, mais devrait diminuer dans les prochains mois davantage que la Banque ne l’avait d’abord prévu, en raison des prix de l’essence plus bas. Les révisions à la baisse des données historiques du PIB effectuées par Statistique Canada, ainsi que les évolutions macroéconomiques récentes, indiquent qu’il pourrait y avoir une marge additionnelle de croissance non inflationniste. La Banque réévaluera tous ces facteurs dans sa nouvelle projection pour le RPM de janvier. »
Conclusion : « Le Conseil de direction estime encore que le taux d’intérêt directeur devra augmenter jusqu’à l’intérieur d’une fourchette neutre pour assurer l’atteinte de la cible d’inflation », a affirmé la banque dans la déclaration, ajoutant que le rythme approprié des augmentations dépendra de « l’effet des taux d’intérêt plus élevés sur la consommation et le logement, et l’évolution des politiques commerciales mondiales. »
« La persistance du choc des prix du pétrole, l’évolution des investissements des entreprises et l’évaluation que fait la Banque de la capacité de l’économie seront également des facteurs importants dans nos décisions au sujet de l’orientation future de la politique monétaire », a déclaré la banque.
Aussi récemment qu’en octobre, les investisseurs s’attendaient à au moins trois autres hausses de taux en 2019. Actuellement, ces attentes ont diminué à pas plus de deux. La banque avait précédemment estimé que la fourchette « neutre » pour les taux à un jour se situe entre 2,5 % et 3,5 %. La déclaration plus que conciliante d’aujourd’hui pourrait bien indiquer qu’au cours de la prochaine année, les hausses de taux seront à des niveaux de beaucoup inférieurs à cette fourchette neutre. |